Michèle LETELLIER, une psy devenue scénariste
Michèle LETELLIER est scénariste de nombreuses fictions, principalement pour la télévision, auteur d'une trentaine de films unitaires, de quelques séries, feuilletons et de pièces de théâtre.
Elle a écrit, entre autres, pour Suzanne Flon, Annie Girardot... et passa une dizaine d'années sur les planches, comme comédienne.
De formation universitaire en psychopathologie et criminologie, elle exerça comme psychologue clinicienne auprès de délinquants et malades mentaux.
« Finalement psy, comédienne, auteur... c'est toujours être curieux de l'être humain, d'où qu'il soit, quel qu'il soit. Essayer de comprendre l'âme humaine, ses forces, ses fêlures. S'y plonger, pour créer et vivre plusieurs vies à travers histoires et personnages. »
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Un parcours atypique.
Menant de front une formation universitaire
(bac+7 en Psychologie à l’Université de Paris, spécialisations en psychopathologie et psychoclinique, également diplômée de l’Institut de Criminologie de la Fac de Droit… « ah ! le souvenir des autopsies à la morgue, le mardi matin… je ne savais pas que cela me servirait un jour pour écrire des policiers ! »)
et une formation artistique (cours Simon, actor's studio, danse…),
Michèle LETELLIER se lance d'abord dans une carrière "sérieuse" de psychologue clinicienne auprès de délinquants et malades mentaux. En CMPP, dans différentes institutions pour enfants et ados. Egalement directrice d'un foyer pour jeunes adultes en difficulté, et professeur de Psychologie dans une école d'infirmières.
Mais, le besoin de la scène la tenaille. Sa vocation, elle le sait depuis l'enfance, c'est l'artistique. Ecrire et jouer. La scène du ClubMed où elle s’amuse, l’été, avec l’équipe d’animation ne lui suffit plus.
Elle est encore psy quand elle écrit et joue (avec Ghislaine Sanguin, mise en scène Philippe Brigaud) son premier spectacle de café-théâtre : Racontez-moi votre enfance ou Ah! laissez-moi mes névroses et reprenez vos endives cuites, une critique ironique des excès des psy, justement, et cartonne. Plus de 400 représentations sur Paris.
Psy le jour, comédienne le soir, elle écrit, la nuit, son second spectacle. Année difficile, mais, au bout, le succès. Michèle quitte son premier métier. Et se lance à fond dans l’artistique.
Créé au Festival d'Avignon puis à Paris, son second spectacle : Je veux être pingouin, qu’elle joue avec la même équipe, connaît le même succès (plus de 300 représentations). Puis, ce sera J'viens pour l'annonce, un one-woman show qu’elle interprétera plus de 150 fois, au Petit Casino à Paris, comme les deux autres spectacles. Trois spectacles, trois succès. Les café-théâtres parisiens la demandent. Mais, elle refuse de poursuivre, peur d’être cataloguée et enfermée dans ce domaine, alors qu’elle sent qu’elle peut jouer et écrire dans des genres bien différents. « Je refusais en me disant : tu fais peut-être la gaffe de ta vie. Mais, je ne voulais pas devenir café-théâtreuse à vie. Je voulais évoluer, passer à autre chose.» Elle refusera même la proposition de Philippe Bouvard, qui venait de l’inviter dans son émission « Passez-donc me voir », d’intégrer la troupe du « Petit Théâtre de Bouvard » qu’il envisageait de créer. « Le Petit Théâtre aurait certainement été un tremplin rapide et ma carrière aurait été différente, plus en vue, mais aurais-je pu quitter l’image de la petite rigolote qui écrit des sketches ? Certains ont réussi, d’autres pas. On ne peut refaire le chemin à l’envers et, à chaque carrefour, il faut bien choisir une route, en abandonnant souvent les autres. Je ne regrette aucun des chemins que j’ai choisis. J’aimerais juste avoir plusieurs vies pour explorer tous ceux qui m’attirent encore.» En tout cas, elle sait gré à Philippe Bouvard, José Arthur et Pierre Bouteiller d’avoir été les premiers à l’inviter dans leurs émissions et à parler de ses spectacles. Une reconnaissance et une chance porteuses.
Enthousiaste, éclectique, Michèle se lance dans l'aventure des radios libres, animatrice de diverses émissions, variétés, jeux, interviews de chanteurs (Francis Lemarque, Isabelle Aubret, William Sheller…), elle écrit des chansons, dont une est sélectionnée lors d'un concours à la SACEM, joue à la Cartoucherie de Vincennes, dans des feuilletons télé, écrit pour France-Culture une pièce qui remporte le prix des pays francophones.
« Dès que je voyais passer un concours, je sortais ma plume… un bon moyen de se faire connaître, quand vous n’avez aucune relation dans ce métier. Et ça marchait ! Trois concours, trois prix. Et les portes s’ouvrent… »
Le déclic "scénario" vient d’une rencontre intimidante, impressionnante. Celle de Lino Ventura, venu, un soir, avec sa femme, dans cette petite salle de café-théâtre pour voir son spectacle qui avait dépassé la 100ème. Au dîner qui suivit, Lino Ventura, qui avait beaucoup aimé le spectacle, étonné par certains textes, lui conseille d’écrire des scénarios pour le cinéma… Elle répond à un concours d’écriture, le troisième… le gagne et se voit donc payée pour écrire son premier scénario. Dans le jury, tous les décideurs de la télévision de l'époque. Ils ne vont plus la lâcher. Henri Spade, directeur de la SFP, l’appelle et lui commande l’adaptation d’un roman pour un feuilleton de dix épisodes, Le dimanche des rameaux, puis l’écriture d’une série originale de douze films d’une heure : Deux maîtres à la maison. Et tout s’enchaîne. Elle passe des comédies : Maguy, Marc et Sophie, Vivement lundi, Imogène, Une famille formidable… au grand feuilleton mélo-dramatique Orages d'été, avis de tempête (9x90’, nomination 7 d'Or du meilleur feuilleton), en passant par le policier : le pilote de Julie Lescaut, La Mondaine, Les Sirènes de Minuit (film avec Philippe Léotard, sélectionné dans plusieurs Festivals internationaux) que Pathé et Claude Barma lui ont commandé.
Michèle a la réputation d’écrire vite et bien. " Bien, je ne sais pas, mais vite, oui, parce que je ne fais plus que ça quand je suis avec mes personnages, les images se bousculent, je les vois agir, je ressens leurs émotions, je dois les capter avant qu'ils ne m'échappent. Ils finissent toujours par échapper à leur auteur. Il faut alors les suivre, ne pas les perdre complètement de vue... jusqu'à the end"
Alors, on fait appel à elle pour restructurer, redialoguer des scénarios en panne, en souffrance.
Script-doctor, rewriting…
« Disons plombier en urgence… une sorte de SOS scénar. Car c’est toujours pour avant hier ! Un défi qui a quelque chose d’excitant et d’angoissant. Je me transforme alors en éponge, je m’imbibe de l’histoire, du milieu, des personnages… voire du rythme de la voix des comédiens principaux pressentis ou déjà engagés, et j’essaie de faire du sur mesure. »
Des défis qu’elle aime relever, mais qui la laissent dans l’angoisse quand elle rend le travail, après trois jours et quatre nuits de plongée non stop dans un scénario qui n’est pas le sien au départ… Car, souvent, la production et le tournage en dépendent.
Elle se souvient de l’accueil de Jean-Luc Bideau dans un hôtel de Suisse, où elle attendait le verdict après la reprise, en extrême urgence, d’un scénario de long-métrage. Toute l’équipe attendait de savoir si elle allait « sauver » la production et si le tournage allait commencer : « Il est venu vers moi, m’a tendu la main en me disant : « Enchanté. Votre métier, c’est magicienne ? » Elle sut alors que c’était gagné. Elle sut qu’elle avait la confiance de l’équipe… et accompli le job demandé. Ouf !
Sans sa reprise du pilote de Julie Lescaut, le tournage ne se faisait pas… Et il n’y aurait jamais eu de série. Quand elle pense, aujourd’hui, à son succès, cela la fait sourire. Elle n’en écrivit qu’un épisode, mais il fut décisif !
Toutefois, il faut rester vigilant, ne pas se laisser piéger par un système confortable financièrement, mais pauvre artistiquement. Elle refuse d'écrire à la chaîne des récurrents sans âme, ou de traiter de sujets qui ne lui parlent pas. "Je n'ai pas choisi ce métier pour pointer, m'enfermer dans des stéréotypes, tourner en rond et renoncer à la création. "
Michèle LETELLIER préfère adapter le livre culte d'Emilie Carles: Une soupe aux herbes sauvages, qui sera interprété par Annie Girardot, Catherine Samie, Rufus..., traiter de sujets sensibles qui lui tiennent à cœur : un seul Louis la brocante, mais autour de l'esclavagisme moderne, qui lui valut un article dans Le Monde, Le poids d'un secret qui évoque, de façon atypique, la reconstruction d'une adolescente après un viol (nominé au Sénat par le Comité Français pour l'Audiovisuel), Rideau de feu parlant des flashes de voyance chez une jeune femme qui les refuse.
Le fantastique dans la vie quotidienne… un de ses thèmes favoris, avec les manipulations génétiques, le vertige des découvertes scientifiques et de ce que les hommes en font. On retrouve ces interrogations dans Le miroir d’Alice, avec Suzanne Flon, qui traite du lien invisible unissant deux petites jumelles qui, pourtant, s'ignorent, puisqu'elles ont été séparées avant la naissance.
"La Science expliquera certainement, un jour, ces phénomènes qu'on dit "étranges", paranormaux, faute d'avoir encore découvert les clés de leur fonctionnement."
A la base de tous ses scénarios: un gros travail de documentation.
Comme comédienne, elle a passé une dizaine d’années sur les planches, le théâtre restant sa passion première, un vrai besoin, tripal… Du café-théâtre à la Cartoucherie, des comédies à La Mouette de Tchekov, en passant par le rôle d’Olympe de Gouges. Différents rôles aussi pour le cinéma et la télévision, des comédies ou des rôles dramatiques, du contemporain et de l’historique.
Ce qui passionne Michèle, c'est tout simplement l'être humain.
" Les deux grands moteurs d'une vie réussie sont bien: "Connais-toi toi-même" et "Deviens ce que tu es". On s'y heurte tous. Jouer, écrire vous permet d'aller au fond de nos abîmes et de vivre plusieurs vies. D'éprouver des sentiments indicibles, en ayant l'alibi du personnage."
Son bonheur: avoir eu la chance d'être jouée par de grands comédiens qu'elle admirait. Elle a écrit pour Suzanne Flon, Annie Girardot, Pierre Vaneck, Rufus, Catherine Samie, Daniel Gélin, Marie-France Pisier, Bernadette Lafont, Sylvie Testud, Andrzej Seweryn... entre autres.
Son grand truc pour décompresser et déconnecter du microcosme parisien:
partir à la découverte d'autres cultures, en Afrique, en Asie, en
Indonésie. Aller à leur rencontre, comprendre nos différences, s’y plonger, s’en
inspirer. « Mes voyages perso en terres inconnues… que je pratique en solo et loin des caméras depuis mes vingt ans ». Assister, par exemple, aux rites funéraires chez les Toradjas, anciens coupeurs de têtes des Célèbes, qui enterrent leurs morts plus
de dix ans après le décès et les "mettent aux balcons" à travers leurs effigies. " Mon
côté ethnologue, un métier qui m'aurait bien plu aussi. Tellement de choses passionnantes dans cette vie trop courte. Pourvu qu'on en ait plusieurs! "
Elle aime aussi peindre, sculpter la terre « faire sortir de ses mains des personnages, d’argile ceux-là », les soirées en petits comités d’amis « pour bien échanger », et cultiver son jardin...
« Je suis active, bavarde en société, mais j’ai besoin de longues plages de calme et de solitude. Je peux passer des heures à observer les oiseaux, les fleurs, à marcher le long des vagues sur une plage, déserte si possible, à contempler les cimes à l’horizon après une longue randonnée en montagne, ou simplement à écouter le silence, le seul vrai luxe aujourd’hui… ou juste le son vibrant à l’infini d’un bol tibétain ou de tingshas».
Ne lui parlez pas de plages bondées, de circuits organisés, de lieux branchés, de grands rassemblements, de selfies, de trucs à la mode genre panurge... « A quoi sert cette surenchère, ce besoin de surabondance superficielle ? Avoir des milliers d’amis ? Quand cultiver l’amitié d’un seul est déjà si difficile, mais si profondément enrichissant que toute une vie ne suffit pas à en faire le tour. Se concentrer plutôt sur la rareté, sur la qualité en toute chose, la déguster, la savourer et s’en sentir privilégié. C’est plutôt vers ça que je tends… sans y parvenir toujours, bien sûr ! »
L’envie d’écrire des romans était là depuis l’enfance, depuis les premières rédactions à l’école… « Quand je serai grande, je serai actrice et quand je serai vieille, à quarante ans, je serai écrivain ». Bon, il était temps de répondre au désir de l’enfant de 9 ans qu’on a été, et de se mettre au roman !
Si Michèle LETELLIER s'est lancée dans l'aventure de l'édition par internet, c'est parce qu'elle est persuadée que l'avenir est là... que c'est, d'ailleurs, déjà bien le présent. Par ce biais, l'auteur évite les lenteurs et les lourdeurs des éditeurs traditionnels, leur frilosité aussi. Il touche directement son lecteur qui peut surfer, à loisir, d'un ouvrage à l'autre, lire des extraits gratuitement, choisir ses thèmes selon son envie, son humeur, commander le livre papier ou en numérique pour le charger sur sa tablette... En 3 clics, votre bibliothèque vous accompagne partout.
" J'adore les livres, leurs odeurs, leurs textures. Ils vous accompagnent toute votre vie, sont les témoins de ses étapes, de vos intérêts successifs, de vos fidélités et de vos chemins de traverse. J'entretiens des rapports affectifs avec ceux de ma bibliothèque, je m'y plonge avec délectation. J'ai aussi des ouvrages anciens, émouvants par ceux qui les ont feuilletés, y laissant, parfois, des annotations datant de plusieurs siècles. Mais, je ne trouve pas contradictoire de charger certains textes pour les avoir partout à portée de tablette, travailler dessus ou, simplement, m'évader avec eux au bout du monde, au sens propre comme au sens figuré. Je tiens aux deux possibilités. C'est pourquoi je n'aurais pas choisi une édition uniquement numérique. Pour laisser le choix au lecteur. "
Michèle LETELLIER a donc publié son premier roman aux Editions du Net : Au bout de ma souvenance
Une fiction à partir de cas réels… Un sujet qui lui trotte en tête et au cœur depuis ses années psy, où elle avait rencontré une jeune femme atteinte de cette « maladie »… mais en était-ce une ?
Une femme sujette à un dédoublement de personnalité, vivant, par moments, dans une sorte d’état second, les réminiscences d’une autre vie, pendant lesquelles elle parlait une langue jamais apprise. De retour à l’état normal, elle ne se souvenait de rien. Au fil des années, l’état second revenait de plus en plus souvent. Cet « autre » s’installait en elle de plus en plus longtemps, squattant son corps, sa vie, la vivant à sa place… Ce qu’elle ne supportait pas, voulant mettre fin à ce supplice en tuant l’autre en elle, donc en se tuant. Une lutte impitoyable de deux âmes pour un seul corps. Fascinant et terrifiant à observer. Pourtant, cette jeune femme n’avait pas l’air "folle", chacune de ses personnalités avait un comportement adapté, équilibré, structuré, normal. La personnalité seconde semblait se remémorer et revivre une vie antérieure très précise et cohérente.
« Le médecin psychiatre, professeur réputé, qui s’en occupait, avait conclu : « après tout, qui a raison, de elle ou de nous ? ». Cette phrase m’a hantée toute ma vie. J’ai fait des recherches, au fil des années, sur des cas semblables dans le monde. Mon but est d’en faire un film cinéma, car le sujet est universel, interroge sur ce que l’on fait là, sur cette terre, sur y a-t-il quelque chose avant notre naissance, après cette vie, sur ce que nous révèlent ces cas rares mais bien réels… Comment refuser de s’y attarder ? Je sentais qu’il fallait que je passe d’abord par le roman. »
Puis, elle a continué sur la lancée romanesque... Un roman policier: Au clair de la mort, mon ami Pierrot. Un recueil de nouvelles et de textes courts: Ce jeune homme a trébuché sur le Temps... et quelques nouvelles du jardin des hommes.
Enfin, son dernier roman: Le lien invisible, adaptation littéraire du film "Le Miroir d'Alice", dont elle a écrit le scénario.
Ses pièces de théâtre, par lesquelles l'aventure artistique avait commencé, ont aussi été éditées.
*biographie réalisée, en partie, à partir d'interviews et d'articles de presse, dont vous trouverez des extraits dans le book presse